La Banque Centrale du Congo (BCC) est déterminée à poursuivre la politique monétaire restrictive en 2017.Déogratias Mutombo Mwana Nyembo, le patron de l’Institut d’émission, a réitéré cet engagement le 13 janvier dernier, lors de la 12ème réunion ordinaire du Comité politique monétaire. Les mesures restrictives seront maintenues en cas de persistance des tensions sur les différents marchés, a rassuré l’Autorité monétaire. Cette annonce est intervenue après que le Comité a passé en revue les principaux faits marquants de l’évolution économique et financière en 2016 aux plans extérieur et intérieur ayant dicté la conduite de la politique monétaire. Ci-dessous l’intégralité de la communication. YKM
BANQUE CENTRALE DU CONGO COMITE DE POLITIQUE MONETAIRE
Kinshasa, République Démocratique du Congo
COMMUNIQUE ANNUEL SUR LA POLITIQUE MONETAIRE
Le Comité de Politique Monétaire a tenu, ce vendredi 13 janvier 2017, au Siège de la Banque Centrale du Congo, sa 12eme réunion ordinaire de l’année 2016 sous la présidence de Monsieur Déogratias MUTOMBO MWANA NYEMBO, Gouverneur de la Banque Centrale du Congo.
A cette occasion, le Comité a passé en revue les principaux faits marquants de l’évolution économique et financière en 2016 aux plans extérieur et intérieur ayant dicté la conduite de la politique monétaire, avant de s’appesantir sur les perspectives pour 2017.
Il en ressort globalement ce qui suit :
o Sur le plan extérieur
L’année 2016 a été principalement marquée par le ralentissement de l’activité économique mondiale dont le taux de croissance s’est établi à 3,1 % contre 3,2 % en 2015. Cette évolution a été le fait du maintien à des niveaux bas des cours de produits de base, de la dégradation des perspectives pour les pays avancés à la suite notamment du vote du Royaume-Uni consacrant le Brexit ainsi que de la croissance plus faible que prévue aux Etats-Unis.
Les pays avancés ont affiché une croissance de 1,6 % contre 2,1 % en 2015, influencée par l’accumulation des incertitudes économique, politique et institutionnelle et la réduction probable des flux commerciaux et financiers entre le Royaume-Uni et le reste de l’Union européenne à moyen terme. Pour ce qui est des économies émergentes et en développement, elles ont connu une reprise, attestée par un niveau de croissance projetée de 4,2 % contre 4,0 %.
S’agissant de l’Afrique subsaharienne, le rythme de la croissance économique a poursuivi avec sa trajectoire baissière et affiché une croissance de 1,4 %, soit un niveau en deçà des taux réalisés aux vingt dernières années.
Pour ce qui est des cours de matières premières, ils se sont stabilisés à la baisse durant toute l’année 2016 avec un trait particulier pour le cours du cuivre qui a affiché un sursaut au dernier trimestre particulièrement, dépassant de 22,5 % le niveau de la période correspondante de 2015. Une tendance analogue a été notée pour le cours du pétrole qui a enregistré une hausse de 41,4 % impulsé par les tractations autour d’une réduction possible de la production entre les pays producteurs.
o Sur le plan intérieur
En 2016, l’économie intérieure a été principalement marquée par une aggravation du ralentissement de la croissance et l’apparition de vives tensions sur tous les marchés.
L’économie congolaise, à l’instar d’autres pays africains, a ressenti les effets néfastes de la conjoncture internationale difficile. Le taux de croissance économique, sur base des données de production à fin septembre 2016, a connu un recul de 4,4 points en 2016, s’établissant à 2,5 % contre 6,9 % en 2015. Ces chiffres pourraient être encore revus à la baisse au regard des données de production à fin décembre 2016 qui n’augurent pas de bonnes perspectives. Hormis les facteurs liés au choc exogène, il y a lieu d’épingler également d’autres facteurs dont celui ayant trait au dysfonctionnement continu dans la fourniture de l’énergie électrique. A cet égard, le CPM réaffirme la nécessité de mettre en place un programme urgent visant la diversification de l’économie nationale à travers des réformes structurelles sur certains secteurs à impact notable sur la croissance et la réduction du chômage.
S’agissant du rythme de formation des prix intérieurs, il s’est fortement accéléré, portant l’inflation à 11,24 % à fin décembre 2016 contre une cible annuelle de 4,2 %. Cette évolution reste très liée aux anticipations de la dépréciation monétaire associées, dans une certaine mesure, aux effets néfastes de décisions de politique économique prises au courant de l’année, notamment le relèvement du prix du carburant à la pompe en date du 30 août 2016.
Au plan des finances publiques, l’exécution des opérations financières de l’Etat s’est soldée par un déficit de 503, 9 milliards de CDF en 2016 tenant à la faiblesse des recettes face à des dépenses rigides. Le CPM s’est dit préoccupé par la hauteur du déficit de l’Etat et appelle à la prise en compte des mesures idoines tant du côté de la mobilisation des recettes que celui d’engagement des dépenses pour éviter au pays de rentrer dans la spirale d’hyperinflation de triste mémoire des années 1990.
Pour ce qui est du secteur extérieur, le marché des changes a été l’axe principal sur lequel s’est basée l’action des politiques macroéconomiques. En effet, après une période de plus de cinq ans marquée par une stabilité relative de la monnaie nationale autour de 920 CDF le dollar américain, le taux de change a dépassé en 2016 le cap de 1.200,00 et 1.260,00 CDF le dollar américain respectivement à l’indicatif et au parallèle. Pour lisser la volatilité du taux de change observée au courant de l’année, la Banque Centrale du Congo est intervenue à cinq reprises sur le marché des changes par la vente des devises d’une somme globale de 250,0 millions de USD.
A fin décembre 2016, les taux des changes se sont situés à 1.215,59 CDF et 1.269,13 CDF le dollar américain respectivement à l’indicatif et au parallèle en moyenne venant de 927,92 CDF et 942,13 CDF à fin décembre 2015.
En outre, les réserves internationales ont connu un recul considérable en 2016. En effet, entre décembre 2015 et décembre 2016, elles sont passées de 1.403,58 millions de USD à 852,38 millions de USD. Cette situation est tributaire principalement, d’une part, de la politique de change active menée par la BCC et, d’autre part, de la baisse des rentrées en devises suite au maintien à des niveaux bas des cours de matières premières et à la mise en application depuis janvier 2014 de la mesure de dédollarisation relative au paiement des charges fiscales des miniers et pétroliers producteurs en monnaie nationale.
Cette réforme a induit le changement du mode d’acquisition des moyens de paiement extérieur par la BCC. En effet, du rachat automatique des recettes minières et pétrolières en devises, la Banque Centrale du Congo s’est vue obligée d’acquérir la devise sur le marché en dernier ressort laissant place préalablement aux banques commerciales. C’est dans ce contexte qu’intervient la problématique de l’accroissement de la production intérieure pour réduire la dépendance du pays vis-à-vis des importations des produits de première nécessité à l’effet d’atténuer la pression sur les réserves de change du pays.
S’agissant de l’orientation de la politique monétaire en 2016, l’Institut d’Emission a poursuivi une politique monétaire proactive en vue d’atténuer la volatilité sur le marché des biens et services. Dans cette perspective, la politique monétaire a été orientée dans le sens du durcissement. En effet, entre janvier et décembre 2016, plusieurs décisions ont été prises par la Banque Centrale du Congo notamment le relèvement du taux directeur qui est passé de 2 % à 7 % et l’ajustement à la hausse des coefficients de la réserve obligatoire en devises qui sont passés de 10 % à 13 % pour les dépôts en devises à vue et de 9 % à 12 % pour ceux à terme après une première hausse intervenue au mois de février dernier.
Pour ce qui est de la régulation de la liquidité, elle a été réalisée via les adjudications des Bons de la Banque Centrale. Néanmoins, le niveau d’encours des Bons BCC est resté faible à 8,5 milliards de CDF par rapport au niveau réalisé à fin décembre 2015 de 47,0 milliards de CDF.
Compte tenu de la persistance des tensions sur les différents marchés, le Comité de Politique Monétaire a décidé ce qui suit :
1. le relèvement du taux directeur de 7 % à 14 % ;
2. l’intervention sur le marché des changes par la vente des devises ;
3. la poursuite de la régulation de la liquidité via le Bon BCC ;
4. le maintien des coefficients de la réserve obligatoires à leurs niveaux actuels, à savoir 13 % et 12 % pour les dépôts en devises à vue et à terme ainsi que 2 % et 0 % pour les dépôts en monnaie nationale à vue et à terme.
o Quant aux perspectives 2017
La Banque Centrale devra poursuivre et accentuer sa politique de communication dans le cadre du renforcement de la transparence de son action. Dans ce cadre, l’orientation de la politique monétaire sera dictée par l’environnement économique et financier. Aussi, en cas de persistance des tensions sur les différents marchés, au plan local, la BCC devrait poursuivre une politique monétaire restrictive.
Fait à Kinshasa, le 13 janvier 2017
Déogratias MUTOMBO MWANA NYEMBO
Président