Le compte à rebours est lancé. Le 30 mai prochain, la zone de libre échange continentale (Zlec) entrera officiellement en vigueur, après les dernières ratifications de la Sierra Leone, de la République arabe sahraouie démocratique. Les deux pays portent ainsi à 22 le nombre de ratifications. Soit le seuil minimum requis par la Commission de l'institution pour le lancement de la Zlec, dont la première phase sera lancée lors du prochain sommet de l'Union africaine (UA), le 7 juillet à Niamey. Un peu plus d'un an après sa signature à Kigali par 44 pays membres, les dirigeants africains concrétisent donc un projet né en 2012. Objectif ? Accélérer l'intégration économique du continent en supprimant les barrières douanières et tarifaires.
Et avec la concrétisation de la zone de libre-échange, l'Afrique s'ouvre sur un marché potentiel de 1,2 milliard de consommateurs, au produit intérieur brut combiné de 2,5 milliards de dollars. Des chiffres qui pourraient faire du continent la plus grande zone de libre-échange dans le monde depuis la création de l'Organisation mondiale du commerce, il y a soixante-dix ans. La réduction des droits de douane intra-africains – l'une des conditions de la Zlec – pourrait également générer des gains de 3,6 milliards de dollars sur le continent grâce à une augmentation de la production et à des biens meilleur marché.
Dynamiser le commerce panafricain
Surtout, la Zlec pourrait accroître le commerce intra-africain de 52,3 % par an, selon la Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique (CEA). En effet, en matière d'échanges intercontinentaux, l'Afrique a du retard. Si les flux commerciaux intra-européens représentent sur la zone 70 % du total des échanges, en Afrique, ils ne s'élèvent qu'à 16 %. Avec des tarifs moyens de 6,1 %, les entreprises sont d'ailleurs confrontées à des droits de douane plus élevés lorsqu'elles exportent en Afrique plutôt qu'en dehors.
Dans ce contexte, la Zlec représente un vivier d'opportunités. Pour le directeur de la Banque africaine de développement (BAD) Akinwumi Adesina, « une Afrique sans frontières n'est pas seulement un idéal politique ». « Elle pourrait également constituer le fondement d'un marché continental concurrentiel pour accélérer la croissance et rendre le continent plus compétitif dans le commerce mondial et les chaînes de valeur », explique-t-il dans le dernier rapport de l'institution sur les perspectives économiques du continent. Le texte exhorte d'ailleurs les pays africains à « axer leur politique commerciale sur les critères exigés par la Zlec ».
Pour cela, cinq politiques-clés doivent s'appliquer : éliminer tous les tarifs bilatéraux appliqués en Afrique, maintenir les règles d'origine simples, flexibles et transparentes, supprimer toutes les barrières non tarifaires sur les biens et services, mettre en œuvre l'accord sur la facilitation des échanges de l'Organisation mondiale du commerce – cela afin de réduire les délais et les coûts de transaction transfrontaliers liés aux mesures non tarifaires –, et enfin négocier avec les autres pays en développement afin de réduire leurs droits de douane et leurs barrières non tarifaires de 50 %. À la clé, les analystes promettent des gains totaux africains à 4,5 % de son PIB, soit 134 milliards de dollars par an, et une augmentation de 15 % du commerce intra-africain.
Une promesse alléchante, qui n'a pourtant pas convaincu tout le monde. Certains « poids lourds » du continent à l'instar du Nigeria – première économie d'Afrique – n'ont toujours pas ratifié l'accord. Une situation qui entrave l'application de l'accord, en plus des problèmes de sécurité et d'infrastructures auxquels peuvent être confrontés les pays membres.
Avec le Point