L'Arabie saoudite a rejoint les pays et les compagnies qui, au regard du succès du projet russe pour la production de gaz naturel liquéfié (GNL) en Arctique, souhaitent participer à son élargissement.
L'Arabie saoudite, qui comme la Russie est l'un des principaux producteurs pétroliers mondiaux, a fait part de son ambition de devenir non seulement un investisseur, mais également un opérateur sur le marché très concurrentiel du GNL, écrit le quotidien Nezavissimaïa gazeta.
L'Arabie saoudite est prête à investir près de cinq milliards de dollars dans le projet russe pour la production de GNL en Arctique, a déclaré le patron du Fonds russe pour les investissements directs (RFPI) Kirill Dmitriev, se référant au ministre saoudien de l'Énergie Khaled al-Faleh. Selon ce dernier, la compagnie Saudi Aramco a l'intention de se joindre au projet Arctic LNG-2 qui sera mené par la compagnie russe Novatek.Arctic LNG-2, d'une capacité de 19,8 millions de tonnes par an, deviendra la seconde usine production de GNL de Novatek après Yamal LNG. Son lancement est prévu pour 2023.
Saudi Aramco espère devenir un acteur central du marché du GNL, notamment grâce aux projets arctiques, a déclaré Khaled al-Faleh dans les couloirs du forum d'investissement de Riyad.
«Novatek cherche à créer l'impression d'une lutte fervente pour les part dans Arctic LNG. La compagnie a déclaré que ce projet était encore plus bénéfique que Yamal LNG, et que la part mise en vente serait inférieure par rapport au premier projet. 49,9% des parts de Yamal LNG ont été vendues, et seulement 40% d'Arctic LNG devraient l'être. De cette manière, Novatek stimule les investisseurs potentiels à se hâter», a déclaré Igor Iouchkov, analyste de la fondation de la sécurité énergétique nationale. Selon lui, Total et la chinoise CNPC sont les principaux prétendants à ces parts. «Il existe également des candidats moins probables — les Saoudiens, la coréenne KOGAS, des compagnies japonaises, l'Inde et le Qatar, poursuit l'expert. Novatek souhaite créer de la concurrence entre ces derniers. Si l'un des prétendants avait la ferme intention d'acheter des parts d'Arctic LNG, Novatek signerait immédiatement un contrat car cela stimulerait les autres. L'absence de contrats fermes indique que pour l'instant, tous les candidats sont dans l'expectative, notamment pour évaluer les perspectives de sanctions supplémentaires des USA contre les projets russes de GNL.»
D'après lui, l'expérience du projet Yamal LNG, qui a prouvé la faisabilité pratique de l'idée, est un facteur positif pour Arctic LNG. «Mais il reste encore des questions concernant l'efficience économique de ce projet, qui dépend fortement de la conjoncture mondiale des prix, de la possibilité d'emprunter la Route maritime du Nord, ainsi que des préférences qui pourront être obtenues pour le nouveau projet. Sachant que la situation de la navigation maritime dépend elle-même de la mise en œuvre des plans pour le développement de la flotte de brise-glaces à propulsion nucléaire», déclare Viatcheslav Koulaguine.
Selon lui, les Saoudiens ont besoin de temps pour analyser l'attractivité des conditions pour se joindre et participer au projet, ainsi que pour convenir de tous les aspects. «Toutefois, ils ont du temps devant eux. Le lancement du projet est prévu pour 2023», souligne-t-il.
L'expert doute que le gaz arctique soit livré en Arabie saoudite. «Les fournitures de gaz arctique dans la région la plus riche en hydrocarbures, qui demanderont une immense logistique de transport, ne sont certainement pas la solution la plus optimale. Il ne faut pas non plus voir l'entrée dans ce projet comme une tentative de mettre en place un business GNL global. Après tout, l'Arabie saoudite n'est pas le Qatar et le commerce gazier n'a pas une telle importance stratégique pour elle. Pour les Saoudiens, ce projet revêt plutôt une importance financière et il est analysé du point de vue de son attractivité en matière d'investissements. La participation d'autres investisseurs internationaux, notamment des acheteurs de gaz comme la Chine, aura une importance pour eux. Cela permettra de partager les risques et d'obtenir des garanties d'écoulement de la production.»Viatcheslav Koulaguine souligne que les sanctions sont à considérer comme l'un des risques liés au projet car pour l'instant, la Russie est incapable de garantir aux usines de GNL leurs propres technologies. «Pour ce qui est des aspects attractifs, on peut citer le grand soutien de l'État — qui se traduit par des privilèges fiscaux, différentes préférences, ainsi que l'aide à l'exploitation des territoires arctiques et la garantie du passage par la Route maritime du Nord. Évidemment, un tel soutien est un aspect attirant du projet pour tout actionnaire», conclut Viatcheslav Koulaguine.
D'après l'expert, théoriquement le Kremlin pourrait être tenté de réguler l'accès au nouveau projet de production de GNL en Arctique. «On peut s'attendre à des recommandations du Kremlin s'il y avait une véritable concurrence pour participer à Arctic LNG. Ce n'est probablement pas le cas pour l'instant», déclare Igor Iouchkov. Et d'ajouter que globalement, les autorités n'ont d'avis négatif sur aucun des prétendants au projet.
Avec Psutnik