Les Etats-Unis et la Chine sont entrés ce vendredi 6 juillet dans une guerre commerciale avec l'entrée en vigueur de taxes douanières réciproques sur des dizaines de milliards de dollars de marchandises, malgré les mises en garde alarmistes et la nervosité des marchés.
Les nouveaux droits de douane américains sont entrés en vigueur ce vendredi 6 juillet comme l'avait annoncé le président Donald Trump. Ces taxes de 25% sur 34 milliards de dollars d'importations chinoises frapperont 818 produits dont des voitures, des composants d'avions ou des disques durs d'ordinateurs tout en épargnant des biens populaires comme les téléphones portables ou les télévisions.
Pékin a immédiatement répliqué en annonçant à son tour de nouvelles taxes. « Les Etats-Unis ont violé les règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et lancé la plus grande guerre commerciale de l'histoire économique à ce jour, a déclaré le ministère chinois du Commerce dans un communiqué. La Chine a promis de ne pas tirer la première, mais pour défendre les intérêts fondamentaux du pays et de sa population, elle est contrainte à une nécessaire riposte. »
« Si un pays veut augmenter les droits de douane, la Chine répondra pour se défendre, a prévenu de son côté le Premier ministre chinois Li Keqiang. Une guerre commerciale ne profite à personne car elle nuit au commerce libre et au processus multilatéral ».
Comme le rappelle notre correspondante à Pékin, Heike Schmidt, le ministère du Commerce avait accusé les Etats-Unis d’avoir « lancé la plus grande guerre commerciale de l’histoire économique qui met en danger la reprise de l’économie mondiale et fera souffrir des entreprises innocentes ». Le ministère compte d’ailleurs défendre ses droits auprès de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
En tout, 545 produits devraient être ciblés. Pékin veut toucher le cœur même de l’électorat de Donald Trump, les agriculteurs. Le soja, le bœuf, le sorgho, le coton ou encore des fruits de mer seront les premières victimes de la riposte chinoise. Mais les fabricants de voitures comme Tesla, Ford et General Motors se trouvent eux aussi dans le collimateur de Pékin.
Trum persiste et signe
Au total, 50 milliards de dollars d'importations chinoises annuelles seront affectés par les mesures américaines destinées à compenser ce que l'administration Trump considère comme un vol de propriété intellectuelle et de technologies. Le président américain s'est dit prêt à taxer 200 milliards de dollars de biens additionnels si la Chine augmente à nouveau ses tarifs douaniers en réaction. Ces mesures pourraient donc porter à 450 milliards la valeur des produits chinois taxés, soit la grande majorité des importations venues du géant asiatique.
La Chambre de commerce américaine a estimé à environ 75 milliards de dollars le montant des exportations américaines touchées jusqu'à maintenant par les mesures de rétorsion des partenaires commerciaux des Etats-Unis. Elle cite notamment six Etats particulièrement affectés, qui ont tous voté pour Donald Trump : l'Alabama, le Michigan, la Pennsylvanie, la Caroline du Sud, le Texas et le Wisconsin.
Ces mises en garde laissent pourtant de marbre le président américain, qui a une nouvelle fois balayé les arguments dans un tweet. « L'économie se porte probablement bien mieux que par le passé, avant que nous réglions le problème des accords commerciaux inéquitables passés avec chaque pays, a-t-il estimé. Une majorité de pays est d'accord sur le fait que ceux-ci doivent changer mais personne ne l'a jamais demandé. »
Guerre commerciale avec les Etats-Unis: la Chine mise sur le soja
Visé par des tarifs douaniers punitifs, Pékin se dit contraint de riposter et devrait notamment cibler le soja américain, avec une taxe punitive de 25%. La petite graine oléagineuse devient donc une arme fatale qui fera très mal aux agriculteurs américains. Les paysans chinois, eux, espèrent en revanche d'être les grands gagnants de ces tensions commerciales. Pékin leur accorde désormais des subventions pour croître la production intérieure.
Pékin n’a pas attendu que Washington mette le doigt sur la gâchette pour lancer ce message aux paysans il faut planter plus de soja. L’objectif est de rendre la Chine moins dépendante des importations américaines, rappelle notre correspondante sur place, Heike Schmidt. A lui seul, le géant asiatique a acheté un tiers de toute la production américaine en 2017.
Cette année, Miao Huai Fang, agriculteur dans la province du Shandong, participera à la campagne nationale dans le but de changer la donne. « L’Etat accorde maintenant des subventions aux cultivateurs de soja, j’ai donc augmenté ma surface, explique-t-il. C’est à cause de la guerre commerciale que le gouvernement nous encourage à planter plus de soja ».
Son collègue et voisin Li Bingdong compte lui aussi tirer son épingle du jeu. « Jusqu’à présent, nous n’avions jamais reçu de subventions, rappelle-t-il. Mais maintenant, je touche plus de 5000 euros d’aides. Tant mieux pour nous, on gagnera mieux notre vie. Moi, je souhaite que la Chine mette carrément fin aux importations américaines et que le prix du soja chinois augmente ».
Cette année, la production du soja chinois devrait croître de 13%. Une mauvaise nouvelle pour les agriculteurs américains qui risquent de perdre leur plus important client. Les commerçants chinois se tournent davantage vers la production chinoise, mais aussi vers d’autres pays producteurs et notamment le Brésil.
Avec RFI