« Certains de ces projets sont aujourd’hui financés par la République dans le cadre du projet PDL-145 Territoires, » précise le rapport de l’Inspection Générale des Finances (IGF).
Contrat WIN-WIN
Ça devrait-être le « contrat du siècle » pour la RD Congo avec la République populaire de Chine (le plus grand contrat que la Chine a signé sur le Continent Noir), signé en 2008 sous le régime de Joseph Kabila Kabange. Un contrat troc qui devrait être « gagnant gagnant », dont la Chine devrait obtenir un accès à long terme aux abondantes ressources, surtout minières que regorge le pays de Lumumba ; cobalt, cuivre, notamment pétrole et autres.
La première phase remonte au 17 septembre 2007, elle prévoyait l’obtention d’un prêt de la banque Chinoise EXIM Bank de de 8,5 milliards $US. L’accord prévoyait notamment l’octroi d’un prêt de deux milliards $US lié à la modernisation de l’appareil de production minière. Deux entreprises chinoises, la Sinohydro et la CREC (China Railway Engineering) devaient réaliser des travaux d’infrastructures, au moins 3500 km de routes, autant de kilomètres de chemins de fer, des infrastructures de voiries, 31 hôpitaux de 150 lits et 145 centres de santé pour une valeur estimée à 6,5 milliards US.
En 2008 la deuxième phase, l’accord fut complété par un prêt supplémentaire de 5 milliards $US.
SICOMINES
Sicomines (Sino-Congolaise des Mines), un Joint-Venture crée entre l’État Congolais représenté par la Gécamines avec 32%, des Chinois de la CREC et de la SINOHYDRO avec 68%, pour un capital de 100 millions $US. Qui reste encore discutable puisque la SICOMINES détenait des actifs de 90.936.120 milliards $US.
Les Chinois de la CREC et SINOHYDRO, devraient apporté 68 millions $US et prêter 32 millions $US à la GECAMINES S.A, pour la libération des parts de la société étatique Congolaise dans le capital social de SICOMINES, qui doivent être remboursés avec des intérêts de 10.979.566 $US par des retenues sur les dividendes de la Gécamines.
A noter que la Chine obtenait notamment, comme le décrit l’article 6 du contrat troc ; « l’exonération totale de tous les impôts, droits, taxes, douanes, redevances directs ou indirects, à l’intérieur ou à l’import et l’export, payables en RDC. »
Conclusion du rapport de L’IGF
Voilà que la conclusion d’un rapport de l’inspection Générale des Finances de la RD Congo (IGF, Agence sous tutelle la présidence de la République) publié ce 15 février 2023, démontre clairement le côté du contrat entre la Chine et la RD Congo, gagnant pour la Chine et perdant pour la RD Congo.
Par exemple sur 10 Milliards $US de revenus générés par la Sicomines, les entreprises Chinoises ont encaissé 9 Milliards $ et seulement 822 Millions $US pour les infrastructures en RD Congo (plus ou moins 11%). Qui restent encore à démontrer, puisque n’ayant aucun impact sur la vie sociale des Congolais, ni de visibilité : « Cette programmation a donc totalement oublié le secteur de chemin de fer, les aéroports à réhabiliter (Goma et Bukavu), les hôpitaux (31) à construire, les deux barrages hydroélectriques à construire (Kakobola et Katende), les réseaux de distribution électrique à réhabiliter (Kinshasa et Lubumbashi), les centres de formation aux métiers ITP à construire et à réhabiliter, les 5000 logements sociaux à construire, les 145 centres de santé à construire et deux universités à construire. » Rapport IGF.
En bref les 31 points relevés dans le rapport IGF
- Constitution de SICOMINES en 2008 en violation de l’article 1er de l’Arrêté Royal du 22 juin 1926 : USD 100.000.000,00 fixés par le GEC étaient très insuffisants et donc disproportionnés à l’objet social. Le point 6°, de cet article 1er précise en outre que le statut doit indiquer la désignation précise des associés qui doivent fournir des valeurs avec l’indication des obligations de chacun.
- Aucune évaluation des gisements miniers apportés par la GECAMINES S.A n’a été faite et donc, défaut d’intégration de la valeur dans le capital social : la Joint-Venture Sicomines d’une valeur de 90.936.120.000 $US, n’a pas était intégré dans le capital social au titre d’apport en nature du Groupe Gécamines.
- Caractère arbitraire, discriminatoire et illégal de la fixation ainsi que de la répartition du capital social à 100.000.000,00 $US : à raison de 68% des parts pour le GEC et 32% pour le Groupe Gécamines (alors que SICOMINES détenait des actifs de USD 90.936.120.000,00). L’article 2 de la loi n° 77/027 précise que les personnes physiques ou morales étrangères ne peuvent pas détenir plus de 60% du capital social.
- Important déséquilibre financier au détriment de la RDC entre les avantages octroyés à la partie chinoise et les engagements à sa charge ainsi que les gains attendus par la partie congolaise : USD 90.936.120.000,00 aux chinois contre des engagements à leur charge de USD 6.2 milliards, soit un gain pour les chinois de USD 84.736.120.000,00 auquel devront s’ajouter les exonérations fiscales et douanières estimées provisoirement aux taux les plus faibles à USD 2.163.623.850,15. Même en déterminant la valeur actuelle nette (VAN), USD 76 milliards $US de gain pour la partie Chinoise contre 3 milliards $US d’infrastructures pour la RD Congo.
- Faiblesse criante et modicité des investissements des infrastructures : SICOMINES a mobilisé, en 14 ans, des financements d’un montant total de USD 4.471.588.685,14 et n’a consacré que USD 822.190.060,14 pour le financement des travaux d’infrastructures, soit 18,38% du financement total mobilisé.
- Paradoxalement Importance des décaissements effectués en faveur des entreprises chinoises en six ans : En six ans, soit de 2016 à octobre 2022, SICOMINES a décaissé. 9.677.613.625,15 $US en faveur des entreprises chinoises et d’elle-même pour diverses raisons non étayées. Pour 1.564.280.538,68 $US « contract payement » pour 1.506.989.864,14 $US et des autres opérations de débit sans indication du motif pour USD 3 827.943.282,32.
- Manque de visibilité et d’impact des travaux exécutés et leur sélectivité injustifiée en violation de l’annexe C de la Convention du 22 avril 2008 : Travaux éligibles exécutés : 534 902 461,66 $US Travaux non éligibles exécutés : 287 287 598,42 $US. « et donc ces travaux sont restés, pour la quasi-totalité, sans impact visible pour les populations. » Cette programmation a donc totalement oublié le secteur de chemin de fer, les aéroports à réhabiliter (Goma et Bukavu), les hôpitaux (31) à construire, les deux barrages hydroélectriques à construire (Kakobola et Katende), les réseaux de distribution électrique à réhabiliter (Kinshasa et Lubumbashi), les centres de formation aux métiers ITP à construire et à réhabiliter, les 5000 logements sociaux à construire, les 145 centres de santé à construire et deux universités à construire, Certains de ces projets sont aujourd’hui financés par la République dans le cadre du projet PDL-145 Territoires.
- Endettement injustifié de SICOMINES, en lieu et place d’un apport des fonds par le Groupement des Entreprises Chinoises : (pour USD 6,2 milliards) ressources dont le remboursement devait être assuré par la SICOMINES. Au lieu de cela, c’est la Joint-Venture SICOMINES qui s’est endettée, à hauteur de USD 3.341.948.821,85 pour financer et les investissements miniers et les infrastructures. Mais en même temps, elle s’est payée à elle-même, de 2016 à octobre 2022, USD 5.464.880.564,06 sur son compte principal de DUBAI au profit d’un ou d’autres comptes non encore identifiés.
- Défaut de production des preuves de libération de CDF 25.000.000.000,00 (50%) du capital lors de la constitution de SICOMINES en septembre 2008 et de 50% autres après l’approbation de l’étude de faisabilité.
- Ambiguïté et confusion concernant le prêt de USD 32.000.000 : Le contrat de prêt affirme tantôt que ces 32 millions $US ont été versés à la Gécamines (point G du préambule) tantôt à la SICOMINES (article 4.1 du contrat du prêt). Dans les éléments mis à la disposition de la Mission de l’IGF, la GECAMINES S.A n’a fourni aucune pièce attestant qu’elle a encaissé ces fonds. Et, de son côté, SICOMINES n’a remis aucun document bancaire attestant qu’au 1er avril 2009, son compte a été crédité de 32.000.000,00 $US.
- Confusion entretenue entre le GEC et SICOMINES : Le GEC ne s’est pas constitué en Association momentanée. Aussi, sur le terrain, le GEC semble se confondre avec SICOMINES et ce, à bien d’égards, faisant supporter à cette dernière la prise en charge de l’exécution de ses obligations contractuelles et notamment financières, prises bien avant que cette dernière ne soit créée. C’est notamment les cas de Pas de Porte de 350.000.000,00 $US qu’il devait payer à la partie congolaise (article 5.1) mais que SICOMINES a payé en trois tranches. Cas aussi du prêt de 50.000.000,00 $US sollicités par la GECAMINES S.A à la signature de la Convention auprès du GEC (article 5.2) mais payée finalement par SICOMINES. C’est aussi le cas du projet de la Centrale Hydroélectrique de BUSANGA qui a été financée à 100% par SICOMINES mais que les Investisseurs chinois (CHINA RAILWAY GROUP LIMITED « CREC » et POWER CONSTRUCTION CORPORATION OF CHINA) considèrent que ce sont eux qui ont investi via la SICOMINES.
- Positionnement malheureux de SICOMINES comme « Emprunteuse » des investissements du projet d’infrastructures : Ce positionnement malheureux de SICOMINES comme Emprunteuse viole gravement les dispositions suivantes : (1) article 10.1 qui dit la Joint-Venture sera chargée du remboursement des investissements miniers et d’infrastructure, (2) article 10.2 qui dispose que le remboursement du financement des travaux d’infrastructure sera effectué par la Joint-Venture ; (3) 9.3 qui précise que le GEC mobilisera et mettra en place le financement pour réaliser des travaux d’infrastructures les plus urgents.
- Défaut de rapatriement des recettes d’exportation et amendes de 5% dues par SICOMINES : SICOMINES n’a pas procédé au rapatriement des recettes d’exportation d’un total de 2.004.167.489,24 $US sur la période allant de 2016 à octobre 2022. Elle doit à ce titre des amendes de 5%, soit 100.280.374,46 $US.
- Recours quasi systématique injustifié au préfinancement des exportations et violation de la Réglementation du change en RDC et du Règlement Minier : de mars 2018 à octobre 2022, SICOMINES a bénéficié des préfinancements de ses exportations des minerais versés sur son compte principal à l’étranger à hauteur de 1.771.408.731, 89 $US. Cette pratique est régie par l’article 39 de la Réglementation du change en RDC. Il s’agit, en réalité, d’un prêt que l’acheteur consent à l’exportateur, qui est assorti des intérêts.
- Existence de plusieurs opérations signalées dans le Rapport mensuel envoyé à la BCC et à la Direction des Mines comme ayant été débité du compte principal : – 858,548 millions USD au titre de paiement des fournisseurs divers ; – 1,220 milliards USD pour les services de la dette ; – 760,124 millions USD relatifs aux autres transferts à l’international et – 1,773 milliards USD pour les autres mouvements débiteurs et dépôt à terme (DAT). Justifications non produites à ce jour.
- Non-respect de la quantité minimale de production prévue : La SICOMINES n’a pas encore pu atteindre la production projetée d’au moins 200.000 tonnes de cuivre en 2016 et 400.000 tonnes de cuivre en 2019 et, ce, malgré l’importance des investissements consentis ou encore l’empiétement des gisements de la GECAMINES S.A. Ceci a aussi des conséquences sur sa capacité à rembourser les investissements dans les meilleurs délais afin d’éviter à la RDC de devoir subir un contentieux.
- Empiétement des gisements de la GECAMINES S.A par les installations de SICOMINES (un gisement à fort potentiel) : les installations, bureaux et logements de SICOMINES sont érigés sur la cible la plus importante des gites probables et possibles pouvant faire l’objet d’une importante réserve additionnelle, à l’issue d’une campagne d’exploration géologique et de certification des ressources minérales. Il s’agit de SYNCLINAL DE LA COLLINE D avec un potentiel attendu de 1,3 millions de t/Cu et l’entreposage des remblais issus de l’exploitation du gisement de DIKULUWE et des écailles de KAMIROMBE sur le PE 9682 issu du PE 8841.
- Paiement irrégulier et injustifié de 4,8% des montants des travaux au titre de « Somme à valoir » : ces frais s’élèvent à USD 37.256.434,59. La légalité d’un tel prélèvement et la destination donnée aux fonds ainsi collectés posent problème.
- Paiement injustifié de la taxe VOIRIE/CONCENTRES à la Province de Lualaba : Paiements totalisant USD 7.700.000,00 en faveur de la Province du Lualaba sans base juridique connue.
- Inscription au bilan du Pas de Porte de USD 350.000.000,00 et application des amortissements de USD 59.610.144 au 31/12/2021 : Impact sur les résultats d’exploitation. Situation décriée par le commissaire aux comptes de SICOMINES et la GECAMINES S.A.
- Paiement de USD 51.000.000,00 à PACIFIC TRINITY sans production du contrat y relatif : et sans les preuves du désintéressement pécuniaire des populations délocalisées du site de SICOMINES.
- Dumping commercial pratiqué et Manipulations des prix de transfert : USD 7.379.469.533,52 : SICOMINES ne vend sa production qu’exclusivement aux entreprises du GEC à des prix arrangés et, nul ne sait à quelle autre condition (…) ses ventes aux cours LME de la période fait ressortir un manque à gagner au détriment de SICOMINES de USD 7.379.469.533,52. Ce qui représente quasiment 50,37% du chiffre d’affaires qu’elle aurait réalisé si elle avait vendu aux cours internationaux.
- Impôt mobilier non déclaré et non reversé à payer : USD 5.424.698,36 : Exercices 2016 et 2017 et défaut de déclaration pour l’Impôt mobilier de l’exercice 2018.
- Financement de tout l’investissement de construction de la Centrale hydroélectrique de BUSANGA par SICOMINES : Financement intervenu en violation de la convention de collaboration et de la convention de Joint-Venture : USD 596.066.577,28.
- Libération totale du capital social de SYCOHYDRO par SICOMINES : Libération faite en violation de la convention de collaboration et de la convention de Joint-Venture : USD 5.000.000,00. Décision de la majorité.
- Imbroglio entretenu dans les périodes de remboursement des investissements : Cet imbroglio a servi à la réduction du montant des investissements des infrastructures de USD 6,5 milliards à USD 3,0 milliards. On a vraisemblablement voulu retarder le remboursement et donc l’apurement de la dette de la RDC vis-à-vis des investisseurs chinois.
- Caractère contestable, complaisant et dépassé des conclusions de l’Etude de faisabilité de CHINA ENFI : la minoration des réserves. En 2021, SICOMINES a encore introduit une autre étude de faisabilité pour le renouvellement de ses Permis d’Exploitation. On y constate aussi notamment une 7 réduction des réserves à 4.747.141,90 tonnes de cuivre et 94.982,97 tonnes de cobalt.
- D’importantes importations des biens en exonération totale sans évidence dans les états financiers : Les importations de SICOMINES de 2009 à fin octobre 2022, de CIF de CDF 3.413.815.915.004,00 et à un FOB en USD de USD 2.275.848.597,00 pour 1.030.005,93 tonnes des biens importés. Sans évidences dans les états financiers, SICOMINES n’ayant pas produit les balances définitives des comptes ni le grand livre.
- Rejet systématique en Conseil d’Administration et en Assemblée Générale, des positions et avis des Actionnaires du Groupe GECAMINES S.A. Abus de majorité tel que prévu par l’article 130 de l’AUSCGIE : Il a été constaté à la lecture des procès-verbaux du Conseil d’Administration et de l’Assemblée Générale de SICOMINES, que les avis et positions des représentants du Groupe GECAMINES S.A sont toujours systématiquement rejetés (…) Ainsi, la Mission demande des justifications quant à cette position quasi outrageante des Administrateurs de la partie chinoise.
- Extension injustifiée à SYCOHYDRO des avantages reconnus à SICOMINES du fait de la convention : SICOHYDRO jouit exactement des mêmes avantages que SICOMINES en termes d’exonération fiscale, douanière et parafiscale au motif qu’elle serait un engagement de la RDC. Ce qui n’est pas correct car la RDC n’a pas pris un tel engagement.
- Inexécution par le GEC de ses engagements contractuels : C’est SICOMINES qui a tout financé jusqu’à ce jour grâce aux emprunts contractés auprès des banques chinoises. D’où nécessité pour la RDC d’opposer au GEC, l’« Exceptio non adimpleti contractus » (l’exception de la non-exécution du contrat).
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