L’affaire fait scandale au Cameroun et essaime un peu partout dans le monde. Liyeplimal. À l’origine un produit crypto-actif transformé en cryptomonnaie, créé par l’homme d’affaires camerounais Émile Parfait Simb. Personnage sulfureux, à la tête de l’entreprise Global Investment Trading, il est proche de certains hommes politiques camerounais mais aussi conseiller du président centrafricain. Lieyplimal, - « la pauvreté est finie » en langue bassa - créé il y a 4 ans, est supposé avoir un rendement important pour ses investisseurs. Cependant, depuis plusieurs mois, la grogne d’investisseurs qui se disent trompés et ne parviennent pas à recouvrer leurs fonds se fait entendre.
L’histoire commence pour beaucoup de la même manière. Un proche les convainc d’investir dans Liyeplimal. « Ca avait l’air convainquant. Elle m’a présentée des garanties, des preuves… ». Un taux de rendement net de 2 à 37% par an avec la possibilité d'interrompre le forfait à tout moment, voici la promesse faite aux acheteurs.
Sabine Ntsama se souvient : « Il y avait toute une publicité qui était derrière. Le monsieur était passé sur des chaines de télévision, la presse écrite, on lui a décerné des prix en trading, on m’a présenté des vidéos où il était avec des chefs d’État comme le président centrafricain qui en faisait la promotion. Il y avait des personnalités des grandes stars ».
Pour les 4 ans Lyieplimal, une fête est organisée à Bangui. Le chanteur Koffi Olomide est présent et fait la promotion de Liyeplimal : « Je recommande à tous les Africains de partout d’adhérer à Lyieplimal aujourd’hui en Afrique il n’y a pas mieux. »
Sabine Ntsama explqiue: « On nous mentionnait également des personnalités du Cameroun et même du gouvernement qui ont investi dans l’affaire. Donc il y avait tout ca. En gros pour vous résumer il y avait tous les éléments qui laissaient croire que c’était une affaire qui marchait. Les preuves de paiement. Donc voilà c’était comme ca que je me suis laissée avoir dans cette histoire là. »
Conférences en ligne, vidéos promotionnelles… Les investisseurs potentiels sont particulièrement incités à investir
« Donc aujourd’hui je vous dis que si vous voulez devenir millionnaire alors placez vos Limo et dans un an on se donne rendez-vous ! » Sabine Ntsama est d’origine camerounaise, elle vit actuellement au Canada. Elle dit avoir investi environ 140 000 $.
Au mois de juin l’année dernière, c’est la douche froide…
« Je fais une première demande de retrait qui est refusée, annulée sans explication. Je fais une 2e le mois suivant parce qu’il fallait faire une demande de retrait une fois par mois soit par carte visa, soit par virement bancaire pour ceux qui étaient de la diaspora comme nous. J’ai fait une première demande de retrait refusée, une 2e refusée, une 3e… Jusqu’à 3 demandes de retrait sur 3 mois successifs. Aucun retrait. Les demandes sont refusées sans explications. »
Victor Mevaa se dit lui aussi victime : « C’était vraiment mes toutes dernières économies que j’avais mis là-dedans. Et ça m’a vraiment mis dans la panade. Je n’ai pas su rebondir directement. Ca a été vraiment très compliqué pour moi, comme pour beaucoup d’autres d’ailleurs. C’est compliqué. C’est une situation que je n’aimerais pas que d’autres personnes vivent. Parce que passer par ces moments là c’est beaucoup de douleur. »
Comme Sabine Ntsama, il dénonce le changement des termes du contrat en cours de route. En passant de Liyeplimal 1.0 à la version 2.0. « Le 1.0 c’était un système vraiment financier donc on investissait notre argent et on avait un rendement chaque mois. Donc c’était pas de la cryptomonnaie, c’était vraiment un service d’investissement. Mais lorsqu’on passe au 2.0 là ils nous basculent vraiment sur de la cryptomonnaie. En fait le 2.0 c’était vraiment la finalité c’est là qu’on s’est rendu compte qu’en fait c’était vraiment une pyramide. »
Mais les messages rassurants se poursuivent
« D'abord la sécurité, et de la transparence. Voilà pourquoi nous sommes passés à cette phase là. »
Cependant les plaignants en sont certains. Ils sont victimes d’une pyramide de Ponzi. Sabine Ntsama n’hésite pas à comparer l’homme d’affaires camerounais au célèbre Bernard Madoff. « Ce qu’on pense, ce qu’on a compris quand on voit le fonctionnement c’est que comme tout système de Ponzi ils prenaient l’argent des nouveaux pour payer les premiers. Jusqu’à ce que le système s’écroule. »
Face aux critiques Émile Parfait Simb – qui revendique 200 000 utilisateurs dans 125 pays - s’est exprimé à plusieurs reprises sur les chaines de télévision camerounaises ainsi que sur son site internet : « Les investisseurs, ceux qui ont investi dans la cryptomonnaie, ont juste depuis le 1er septembre un problème d’incompréhension sur la nouvelle tournure que l’entreprise a prise. »
En mai 2021, la Commission de surveillance du marché financier de l'Afrique centrale mettait en garde contre Global Investment Trading et son Liyeplimal, dénonçant des campagnes frauduleuses de collecte de fonds.
Un noyau d’une centaine de personnes mène actuellement des actions en justice au Cameroun, aux États-Unis, au Canada et en France…
Rfi